visions et expériences d'un ancien étudiant (épisode 2 : le choix d'orientation).

      La semaine dernière, nous avions parlé du harcèlement au collège, et nous avons possiblement parlé de mesures, visant à améliorer la vie des collégiens victimes du harcèlement scolaire. Cette semaine, nous allons tenter de nous centrer sur : le choix d’orientation en 3 ème. Un choix que l’on fait tous à l’âge de 14 ou 15 ans, et qui déjà à cet âge-là, peux définir toute notre scolarité, voir toute notre vie. Ce que l’éducation nationale, l’administration scolaire, le corps enseignant ne sait pas ou peu, c’est que ce choix d’orientation qui commence dès la 4ème, ne conviens pas à tout le monde. 

Beaucoup d’élèves arrivé à ce stade n’ont aucunement conscience que ce choix fatidique, sera le début de ce par quoi ils seront peu-être défini toute leur vie.

J’ai trois questions à vous poser :

  • A quinze ans est-il normal de devoir faire un choix majeur et obligatoire pour nos vies?
  • Les notes doivent t’elles définir ce que l’on va devenir toute notre vie?
  • Les professeurs et ou le corps enseignant sont-ils en droit de nous imposer un choix, si notre choix ne correspond pas à la réalité des notes ?

Pour cela, je vais vous raconter ce que j’ai observé et vécu lors de mon année de troisième. Comme je l’ai rappelé dans la partie 1, j’ai évolué au sein d’un collège ZEP. J’étais un élève plutôt moyen, en bref : j’avais un haut potentiel, dans certaines matières comme : l’histoire, le français, le latin, la science, la musique, les arts-plastique, etc. Un potentiel moyen (çà à évolué bien après.) dans les langues comme la physique-chimie, l’anglais et l’espagnol (que j’avais commencé en 4ème, et une langue ne se maîtrise pas en deux ans) et en dernier il y avait les mathématiques ou je ne faisais que le strict nécessaire. Personnellement, j’ai eu mon brevet sans le passer, j’ai absolument sauté les épreuves, car la directrice nous avait convoqué moi et un de mes amis, cinq minutes avant l’épreuve de mathématiques, pour nous l’annoncer officiellement. Joyeux et fanfarons, nous sommes allées à l’épreuve pour marquer nos noms et rendre la feuille vide au professeur, pour ensuite rire et danser très rapidement en sortant devant les élèves et bien sur notre professeur de maths.

Le choix d’orientation survient à trois moments précis de l’année : décembre, mars et fin mai. En décembre, c’est une question simple : que voulez-vous faire l’année prochaine ? À ce moment-là, on a le droit de répondre ce que l’on veux. Personnellement, pour ma part, j’ai automatiquement mis : “je veux aller en Seconde Générale STI”(c’est une seconde qui se spécialisait en design, architecture et création.) ce qui n’avait pas dérangé le corps enseignant à ce moment-là. L’année se poursuit et je ne travaille pas vraiment dans deux matières : les maths et la physique deux matières sur une bonne dizaine et en mars, ça a commencé à poser un problème. On nous donne la feuille d’orientation une deuxième fois, il y a la réponse du corps enseignant qui est :

“Au vu de vos notes, vous ne pouvez pas accéder à la générale STI, veuillez choisir une autre orientation”.

 

Un peu frustré au premier abord, je me dis que ce n’est pas grave “je vais faire une seconde générale” donc je coche la seconde générale et je rends la feuille et c’est à partir de là qu’on commencé les problèmes pour moi. Je recontextualise la chose, il n’y avait que deux matières qui me faisaient défaut : les mathématiques et la physique chimie, et les langues où je me situais entre 10 et 13 mon professeur principal (rip) me convoque pour me dire qu’au vu de mes notes, je devrais opter pour une seconde professionnelle. Je ne voulais pas, car intérieurement, je savais que je pouvais faire mieux, de plus les bacs professionnels avaient mauvaise réputation à l’époque. Entrer en professionnel voulait dire qu’on était nul, un imbécile à en devenir, pire une racaille. C’était mal vu et je ne voulais pas être assimilé à ça. Il y avait beaucoup d’histoires bizarres de bagarres, etc. Qui passaient aux informations. Donc j’ai poliment refusé, en promettant que j’allais remonter mes notes. Le professeur a accepté, il croyait en moi, car il était encore possible que je change, à vrai dire mon cas n’était pas si désespéré. D’un autre côté, je ne le savais pas, mais j’étais déjà condamné par le corps enseignant : en effet leur choix était déjà arrêté, dès le deuxième semestre. Pour preuve, c’est lorsque j’ai eu mes bulletins à la remise du brevet que j’ai pu observer la mention “Bac professionnel” en bas de page du deuxième trimestre. J’ai donc travaillé dans les matières, afin de remonter mes notes, pour les mathématiques, c’était foutu, mais dans les autres matières tout était possible et je l’ai fait. Le problème est que mentalement, j’étais entré dans un questionnement qui me semblait impossible : 

“Si je rate ce trimestre qu’est ce que je vais faire ? Dans quelle école professionnelle je vais aller ? Je vais choisir quoi ? Quel métier m’intéresse ?”

Toutes ces questions fusaient tous les jours dans ma petite tête, tout le temps même le week-end. En parallèle, le professeur avait lancé une action ou tous les élèves condamné, c’est-à-dire ceux qui avaient des notes impossibles à rattraper (mais aussi ceux qui avaient des bonnes notes et se cherchaient) devaient aller à des salons d’orientation, mais avaient aussi l’occasion d’aller voir des professionnels. Beaucoup de ceux qui étaient condamnés avaient abandonné ils/elles avaient coché : “j’accepte la défaite, je choisis d’aller en bac professionnel” découragé, ils laissaient peu à peu tomber. Je ne suis pas allé à ces sorties, ça ne m’intéressait aucunement. Je voulais simplement aller en général, par ce qu’il y avait une classe spécialisée en arts plastiques ma spécialité, j’adorais les arts et principalement, j’adorais dessiner, et en plus de ça, on m’avait dit qu’il y avait des voyages à l’étranger comme Londres. En plus de tout ce qui se passait, j’avais eu vent par un élève que mon nouveau professeur de physique-chimie qui avait du mal à se faire respecter des élèves, avait tout comme moi un père atteint de maladie mentale. L’élève en question se moquait du professeur, mais moi, ça m’avait touché, étant dans la même situation que lui, je me disais “je ne suis pas seul” alors le seul moyen que j’ai trouvé pour lui montrer que je le supportais dans son épreuve, était de travailler plus durement dans son cours ce qu’il avait remarqué et donc il m’encourageait. 

J’ai donc travaillé chaque soir, je travaillais et j’ai remonté certaines de mes notes, certains professeurs l’avaient remarqué et donc je pense qu’au conseil de classe, il y a eu un débat vis-à-vis de moi et que c’est remonté jusqu’à la directrice. Personnellement, je prenais mes distances avec cette directrice par ce que depuis qu’elle m’avait confisqué et avait vu les photos de mon téléphone, elle agissait bizarrement… Je suis donc convoqué avec ma mère, ou on parle de mon avenir et en même temps, elle me caresse les jambes avec ses talons sous son bureau. Ça me dégoutais, mais je ne peux rien dire, j’espérais que ma mère le remarque, mais rien. Au final, elle nous tend la feuille d’orientation où on nous laisse le choix. Je demande à nouveau une générale, elle désapprouve et tente par tous les moyens de me faire choisir une voie professionnelle. Têtu, je persiste, car je ne voyais pas d’autre option. Je ne voulais pas finir en professionnel, je ne voulais pas mal tourner, je voulais juste faire de l’art rien de plus ni de moins. La directrice au final accepte, car après tout, j’avais le niveau et comme je l’ai dit plus tôt, j’ai obtenu mon brevet sans avoir à le passer. Au final, j’avais remonté toutes mes notes et le lycée général de Noisy-le-Sec Olympes de Gouges m’avait accepté.

Au travers de mon expérience au collège, j’espère à voir réussi à montrer, décrire dans quel état d’esprit un élève de 15 ans peu être face à cette impossibilité de choisir une voie qui le définira toute sa vie. Comment un adolescent de 15 ans qui n’a aucune idée de la vie, des métiers, etc. Peux t-il/elle être amené à choisir le destin de sa vie ? Oui, ici, nous pouvons parler de destin, car pour vous dire pour la plupart des élèves qui ont fini en professionnel, ont soit très mal tourné et ont fini dans la drogue voir la prison, soit font un métier qu’il/elle détestent. Pour d’autres, ça a été bénéfique, une grande question se pose : doit-on laisser les notes définir qui nous sommes ? Personnellement, je pense que non, il faudrait trouver d’autres chemins, d’autres voies d’autres critères de sélection autre que les notes. Concernant le corps étudiant et le droit d’imposer un choix qui correspond mieux aux capacités d’un élève, je remettrais cette façon de faire à moitié. Par ce que j’ai quand même eu le choix de m’opposer à leur décision, mais j’ai vraiment pas apprécié le fait qu’on me catégorise, stigmatise, car il était là le problème “cette stigmatisation”. Pour le corps enseignant la direction que je devais prendre était obligatoirement “un bac professionnel” tout simplement par ce que je venais du 93 et donc mis à part être quelqu’un d’exceptionnel, je devais comme tous les autres finir en professionnel. Vous conviendrez qu’à l’époque, il y a déjà un problème ou était l’égalité des chances ? Nul part, mon avenir était déjà sellé alors qu’il restait un semestre. Si moi, j’ai pu y échapper par chance, qui dit que cette stigmatisation des élèves du 93 n’a pas perduré ? Qui dit que cette stigmatisation n’est pas devenu une norme depuis une bonne quinzaine d’année ? Pensons-y. 

Ps : j’ai par la suite raté mes deux années en lycée général, l’une à cause d’obligations professionnelles (j’étais devenu danseur professionnel.) la deuxième par moi-même, mais cela sera expliqué, dans le prochain épisode, qui parlera des problèmes du système scolaire au lycée, de la réorientation, de l’abandon scolaire et de la grande traversée du désert qu’un élève doit parcourir s’il souhaite retomber sur ses pattes. 

gelan kouvoulou